Coucou, chers lecteurs. Vous savez que j’ai adoré ce premier roman de Manon Dastrapain, un récit fantastique dont les thématiques liées à l’actualité ne peuvent laisser les lecteurs indifférents.
J’ai eu le privilège d’en suivre l’écriture semaine après semaine, sur la plate-forme collaborative Scribay.
Vous trouverez bientôt ici une chronique au sujet de cet ouvrage (que je termine de relire posément).
Cette auteure, pour son premier roman, a choisi la voie difficile, mais combien gratifiante de l’auto-édition, raison pour laquelle j’ai voulu lui demander de partager avec nous son expérience en la matière.
- Pourquoi avoir choisi l’autoédition plutôt que l’édition classique ?
Pour être très honnête, c’était plutôt un choix contraint. Comme beaucoup d’auteurs débutants, j’ai d’abord suivi le parcours « habituel » : j’ai envoyé mon manuscrit à toute une série de maisons d’édition à compte d’éditeur, malheureusement sans succès. Après ce premier tour de soumissions, j’ai tenté d’analyser les refus essuyés et réfléchi aux autres possibilités qui s’offraient à moi. Même si mon roman accumulait peut-être trop de « handicaps » (premier tome d’une trilogie pas encore achevée, à cheval sur plusieurs genres et d’une autrice inconnue) pour être retenu par les éditeurs que j’avais sélectionnés, je restais convaincue de son potentiel. Mais comme il traitait de thèmes liés à l’actualité, je ne voulais pas attendre trop longtemps avant de le mettre en vente, au risque de le voir perdre de sa pertinence, et je n’avais pas envie d’attendre à nouveau six mois la réponse d’autres éditeurs. C’est à ce moment que j’ai opté pour l’autoédition. J’étais par ailleurs bien consciente du fait qu’une bonne partie de la promotion d’un livre repose en réalité sur les épaules de l’auteur, et donc que sur ce point le mode d’édition n’est sans doute pas le plus déterminant.
- Avant de te lancer, as-tu suivi des formations, ou des livres particuliers que tu souhaiterais recommander aux lecteurs ?
J’ai principalement écumé Internet à la recherche de témoignages et de conseils sur les différents aspects de l’autoédition, notamment publiersonlivre.fr et les sites de plusieurs grands prestataires de services dans le domaine (Librinova, Bookelis, Iggybook, Publishroom). Le livre « C’est moi qui l’ai écrit » de Laurence Ortegat, fondatrice de la Compagnie Cléa et coach d’auteurs, m’a également fourni pas mal d’informations intéressantes sur le processus et les défis rencontrés par les auteurs autoédités.
- Quelles sont les étapes d’une stratégie d’autoédition ?
Je crois que la première étape est de préciser quel objectif on poursuit via la publication. Veut-on, comme c’est mon cas, essayer d’atteindre un maximum de lecteurs ou simplement avoir le plaisir de tenir son livre entre les mains et de l’offrir autour de soi ? Ce choix influencera évidemment le contenu exact des étapes subséquentes. Parmi celles-ci, on trouve : la relecture du texte, la correction, la mise en page, le design de la couverture, la création des fichiers EPUB et d’impression (si l’on souhaite publier le livre en format papier), le référencement sur les plateformes de vente (ou la mise en place de la distribution), et finalement la promotion.
- Dans ces étapes, qu’est-ce qui peut être fait soi-même et qu’est-ce que tu conseilles de sous-traiter ?
Je crois que tout dépend des objectifs poursuivis, du temps que l’on peut investir et du budget qu’on est prêt à y consacrer. Je connais un auteur qui a uniquement sous-traité la création de sa couverture et est passé par Amazon KDP pour la mise en vente, avec un résultat tout à fait satisfaisant à la clé.
Bénéficier de l’aide de bêta-lecteurs (sur le fond) et de relecteurs (sur la forme) me semble essentiel pour d’abord s’assurer de la lisibilité du texte, mais il existe de nombreux sites d’entraide entre auteurs (dont Scribay et sa super communauté) qui permettent de se passer de services professionnels moyennant un minimum d’investissement en temps. L’achat d’un logiciel de correction (comme le bien connu Antidote) peut également constituer une option sécurisante. Je sais qu’il existe par ailleurs de nombreux outils pour mettre en page le texte, même si je n’ai pas eu l’occasion de les tester, et c’est pareil pour la couverture (avec le site Canva, par exemple). Bien sûr, si l’on souhaite donner à son livre un aspect plus « professionnel », il peut être intéressant de s’attacher les services d’un graphiste pour créer la couverture ; il s’agit tout de même d’un élément essentiel du livre, susceptible d’attirer ou de rebuter des lecteurs potentiels. Personnellement, j’ai choisi de faire appel à une graphiste spécialisée, parce que je souhaitais obtenir une couverture plus sophistiquée et qui corresponde vraiment au contenu de mon roman.
Ensuite, si l’on veut vendre une version papier, l’impression et la distribution peuvent également être gérées de manière plus ou moins autonome. À condition de disposer de temps, on peut ainsi très bien faire imprimer un certain nombre d’exemplaires du livre et en assurer soi-même l’envoi aux acheteurs, via son propre site web. On peut à l’opposé recourir aux services d’un prestataire pour l’impression et l’envoi à la demande des exemplaires commandés, voire choisir une distribution « classique », avec une présence physique du livre dans certains points de vente, formule coûteuse, mais qui garantit une grande visibilité. Selon le prestataire choisi, ces dernières options entraînent le référencement du livre sur un éventail plus ou moins étendu de plateformes (Amazon, Fnac, Furet du Nord, Cultura, Decitre, Kobo, etc.).
Enfin, même si la promotion va d’office requérir pas mal d’investissement de la part de l’auteur afin de solliciter son réseau d’amis et de connaissances, j’aurais tendance à conseiller de recourir aussi à l’aide de professionnels sur cet aspect. Création de visuels pour les réseaux sociaux, rédaction d’un communiqué de presse, contact avec des journalistes et des blogueurs, gestion d’une campagne publicitaire, etc. ; toutes ces tâches peuvent avoir un grand impact sur la diffusion de votre livre, mais requièrent énormément de temps lorsqu’on n’en est pas spécialiste.
- Quels critères étaient importants pour toi pour sélectionner tes partenaires d’autoédition ? Avais-tu établi un cahier des charges ?
Très pragmatiquement, mon premier critère était la facilité, et plus précisément le fait de pouvoir bénéficier des services d’un seul prestataire pour ne pas perdre trop de temps en multipliant les recherches ou le travail de coordination. Ensuite, c’était la garantie d’une distribution correcte du livre en Belgique, où se trouveraient forcément mes premiers lecteurs. Vu qu’il n’y a, à ma connaissance, pas de prestataire belge qui propose des services complets d’autoédition, j’ai vérifié que les sociétés françaises qui pouvaient répondre à mes besoins assuraient une bonne diffusion en dehors de la France. Enfin, je voulais avoir une bonne qualité d’impression, pour que la version brochée présente bien, et aussi bénéficier de prestations de promotion (rédaction d’un communiqué de presse, contact de journalistes et blogueurs, etc.). Le prestataire que j’ai choisi regroupait tous ces services pour un prix raisonnable.
- Peux-tu nous parler du temps que prend l’ensemble des processus jusqu’à la publication ?
Le délai dépend certainement du nombre et de la réactivité des prestataires. La durée initialement prévue pour la publication de mon livre s’élevait à un mois pour la relecture et la mise en page du texte, un mois pour la création de la couverture et du fichier imprimable et un mois supplémentaire pour la mise en place de la distribution et du référencement. Naturellement, à chaque étape il convient de prendre le temps de vérifier que tout est en ordre ; les corrections peuvent s’avérer particulièrement chronophages et impacter sensiblement la durée totale.
- Pourquoi ne pas être passée par Amazon KDP ? Pour des raisons éthiques ou autres ?
Oui, totalement pour des raisons éthiques. Même si je ne pouvais pas me passer d’Amazon pour élargir l’accessibilité de mon livre (mon but étant d’abord d’être lue !), il était essentiel pour moi que mes lecteurs puissent aussi se le procurer via d’autres plateformes et dans de vraies librairies. Le modèle économique d’Amazon est aux antipodes des valeurs que je défends ; je ne pouvais pas publier un livre qui parle, entre autres, de bien-être des travailleurs et obliger mes lecteurs à passer par Amazon…
Un tout grand merci à Manon Dastrapain d’avoir accepté de partager son expérience avec nous. Je souhaite un énorme succès et une longue vie à cet ouvrage bien écrit, intelligent et engagé.